Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
12 mai 2017 5 12 /05 /mai /2017 12:40
L'actualité judiciaire burkinabé conforte les thèses de mon dernier ouvrage!
Partager cet article
Repost0
16 décembre 2014 2 16 /12 /décembre /2014 11:22
La junte de Zida bâillonne le CDP et l’ADF-RDA : la démocratie burkinabé étranglée !

Une tribune internationale de Franklin Nyamsi

Professeur agrégé de philosophie, Paris, France

Quand les signes avant-coureurs d’une monstruosité politique se montrent, ceux qui les dénoncent passent pour des empêcheurs de tourner rond, des aigris, des has been sans fair-play, ou pire des ennemis du progrès sociopolitique. Pourtant, les courtes jambes du mensonge le font vite rattraper. On a beau croire que dans un élan de modestie, les usurpateurs du pouvoir reviendront à des mœurs réellement consensuelles. C’est mal connaître la psychologie des parvenus. La médiocrité est une forme d’autosuggestion, d’autohypnose. Le monstre, à force de se donner des allures d’agneau, finit par croire qu’on le croit et par se laisser aller aux pires forfaits, espérant que le nuage de bienveillance dont il jouit s’éternisera définitivement. L’heure de la dissipation de l’imposture vient pourtant comme un voleur. Et elle prend la main dans le sac, les pseudo-démocrates dévoilant leur projet funeste. Qui niera que le régime du Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida vient d’avouer enfin au grand jour son mépris de la démocratie représentative et de basculer dans les enfers du populisme ? Au regard de l’interdiction violente et virulente prononcée ce lundi 15 décembre 2015 par la junte du Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida contre l’ex-parti au pouvoir, le Congrès pour la Démocratie et le Progrès, et contre l’allié du CDP, L’ADF-RDA, force n’est-il pas de reconnaître qu’un irréversible Rubicon a été franchi dans l’escalade antidémocratique au Burkina Faso ? Qui dira encore que Zida et Cie ne choisissent pas le parti du pire pour leur pays ? Vivement, pour agrémenter la galerie, les commentaires des pince-sans-rire de la bienpensance illuminée, assis dans leurs alcôves éthérées et sûrs de leurs jeux de mots aussi creux que leurs vies insipides. Je voudrais dans la présente tribune m’intéresser précisément à trois questions essentielles pour analyser et juger de cette interdiction de parti politique : 1) Le régime du Lieutenant-Colonel Zida – puisque M. Kafando n’en n’est que le masque impuissant- peut-il fonder en droit l’interdiction du CDP et la détention actuellement prolongée du ministre d’Etat Assimi Kouanda, secrétaire exécutif dudit parti ? 2) Les laudateurs de la « révolution burkinabé » peuvent-ils encore se gargariser de progrès politiques issus du putsch des 30-31 octobre 2014 quand on assiste à la négation des vingt-sept années de pluralisme politique que le Président Compaoré a impulsées à la tête de l’Etat burkinabé ? 3) Qu’augure cette radicalisation de la junte militaire burkinabé, en cette Afrique de l’Ouest qui n’est pas encore guérie des pitreries grossières et mémorables d’un Guéi Robert, d’un Dadis Camara ou d’un Amadou Haya Sanogo ?

I

De l’interdiction du CDP et de l’ADF-RDA : un acte illégal et illégitime

Un peu de mémoire, diantre ! En 27 ans de pouvoir, le président Compaoré n’a jamais interdit un parti politique au Faso. Quand le Chef de Bataillon Saliou Djibo dépose le président Tandja Mamadou au Niger le 18 février 2010, le MNSD Nassara parti présidentiel, n’est pas suspendu et pourra se repositionner comme deuxième force politique du pays. Mesure-t-on l’outrecuidance d’un Zida qui ose interdire le parti de l’indépendance du Faso, l’ADF-RDA pour biaiser la transition en cours ? Quel mépris des symboles fondateurs de ce pays ! L’Histoire le retiendra. L’interdiction des partis politiques du CDP et de l’ADF-RDA par la junte Zida brise une longue tradition pluraliste au Faso, ramenant le pays à l’ère liberticide et centraliste (1983-1987) du très populiste Thomas Sankara, dont la seule évocation des forfaits contre le pluralisme burkinabé rend ses adorateurs ivres de sang et prêts à la vengeance, comme si les épouses des sept militaires passés par les armes sous les ordres du Capitaine Thomas Sankara le 11 juin 1984 ne méritaient pas autant justice que n’importe quelle victime de violence dans ce pays. Here we are ! comme disent cependant les Anglais. L’heure de la vérité a sonné. Les loups ôteront les peaux d’agneaux qui les masquent. De quel droit la junte de Zida peut-elle donc interdire des partis politiques qui doivent leur existence à la garantie de la loi fondamentale encore en vigueur, à savoir la constitution burkinabé ? L’argument consiste bien sûr, pour le colonel Auguste Denise Barry qui s’essaie au dur métier de Goebbels, que le CDP et l’ADF, deux partis qui constituaient la majorité réellement élue aux législatives précédentes, sont suspendus au motif qu’ils auraient exercé « des activités incompatibles avec la loi portant charte des partis et formations politiques au Burkina ». A la question : de quelles activités s’agit-il, cependant ? L’arrêté du Colonel Auguste Denise Barry reste désespérément muet. Mystère : les entorses évoquées sont inconnues, comme dans un procès kafkaïen. On découvre alors que le seul tort des coupables, c’est désormais l’inconvénient de leur pure et simple existence.

Interdire au demeurant des partis politiques présuppose la légalité et la légitimité de l’autorité posant l’acte. Qu’en est-il de la junte au pouvoir à Ouaga ? Ni légalité, ni légitimité ne la revêtent. Le colonel Auguste Barry, comme son patron Zida, ne sont pas des représentants du peuple burkinabé, qui ne les a jamais choisis pour diriger le pays, mais qui les subit parce qu’ils les braquent au canon. Pour le premier critère, la bande à Zida se base d’abord sur le texte d’une Charte dite de transition dont nous avons établi amplement qu’elle est, en son principe et ses articulations instituantes, une trahison contre le progrès démocratiques au Faso. Comme l’a si bien rappelé récemment à Paris le président Alassane Ouattara, lors de sa conférence de presse conjointe avec le président François Hollande, le gouvernement burkinabé actuel est qui plus est illégitime car non-issu d’élections libres, transparentes et internationalement certifiées conformes aux us et coutumes démocratiques. On ne peut rien négocier ni signer de fiable, au triple plan économique, sociopolitique et géostratégique avec un gouvernement de passagers sans crédibilité démocratique.

Enfin, la loi n°32-2001/AN du 29 novembre 2001 portant Charte des Partis Politiques, invoquée par la junte militaire de Yacouba Zida pour interdire le CDP et l’ADF-RDA ne prévoit en aucun cas une suspension sans motivation précise et avec durée illimitée. En l’article 30 de cette loi, il est justement écrit, pour la gouverne de nos bidasses sans finesse :

« Article 30 : En cas de violation des lois et règlements de la république par un parti ou une formation politique et en cas d’urgence ou de trouble de l’ordre public, le Ministre chargé des libertés publiques peut prendre un arrêté de suspension de toutes activités du parti concerné et ordonner la fermeture de son siège. L’arrêté de suspension doit être motivé et comporter la durée de suspension qui ne peut excéder trois mois. »[1]

Or donc, en quoi le CDP et l’ADF-RDA qui n’ont surtout pas participé comme la junte de Zida et ses amis de l’UPC ou les sankaristes, au saccage de Ouagadougou des 30 octobre au 1er novembre 2014, ont-ils troublé l’ordre public ? Sont-ce le ministre Assimi Kouanda, le CDP, l’ADF-RDA et la FEDAP-BC qui ont brûlé l’Assemblée Nationale, pillé de nombreux domiciles privés et donné la chasse aux cadres du CDP à travers le territoire national burkinabé avec hargne et délire ? Mieux encore, comment comprendre que le soldat Barry, à la lecture de la loi du 29 novembre 2001, n’ait pas vu l’importance des clauses de motivation d’interdiction et la limitation de toute suspension – même légitime- à trois mois maximum ? Décidément, la junte du Lieutenant-Colonel Zida excelle dans l’art de noyer son chien après l’avoir accusé de rage. Voici donc les pyromanes du Faso qui jouent aux pompiers, croyant ainsi amuser davantage la galerie de leurs suiveurs aveuglés par la haine stérile. Il n’est que de lire les communiqués arbitraires servis au public pour s’en convaincre.[2]

II

La démocratie de Zida ou l’empire délétère des Judas

On a pourtant vu de nombreuses autres transitions politiques se faire dans le sous-continent africain, sans que l’ancien parti au pouvoir ne soit privé du droit essentiel de se défendre contre ses rivaux dans les urnes. Cette interdiction du CDP et de l’ADF-RDA ne vient-elle pas confirmer qu’un complot de longue date, rassemblant des segments de l’armée et de l’opposition politique burkinabé, couvait contre la démocratie dans ce pays ? Prenons, à titre d’exemple un parti comme le Front Populaire Ivoirien en Côte d’Ivoire, objectivement responsable de terribles exactions contre les populations civiles de son pays, pendant la crise postélectorale 2011, qui a été sanctionnée par la chute du régime Gbagbo. Pourquoi, alors qu’il y a eu près de 3000 morts dans le conflit fratricide entre les FDS pro-Gbagbo et les FRCI, le nouveau pouvoir Ouattara ne s’est-il pas permis d’interdire le Front Populaire Ivoirien de poursuivre ses activités dans toute l’étendue du territoire national de Côte d’Ivoire ? Non pas parce que la Côte d’Ivoire est la Côte d’Ivoire, comme on le dirait dans une tautologie vide de sens. Mais bien parce que le pluralisme politique est la condition de la transition collective vers une paix des braves dictée par un verdict des urnes lui-même ouvert aux aléas des choix effectifs du peuple.

Or comme en Côte d’Ivoire en 2000, Zida choisit la voie de Guéi pendant que Kafando, Bénéwendé et Diabré jouent les Gbagbo. Pendant que les alliés politiques de la junte militaire s’évertuent à croire qu’elle travaille à leur dégager la voie pour un accès assuré au palais présidentiel de Kosyam lors des futures présidentielles 2015, Zida et ses hommes – au mépris du reste des humeurs contrariées de Kafando-, placent à coups de décrets et de procès d’intention populistes, leurs hommes-clés aux postes-clés, afin de garder la main de leur coterie armée sur l’avenir. C’est dans le dos du peuple burkinabé, et non au nom du peuple burkinabé que la junte de Zida évolue. En offrant au peuple des cadres du CDP et de l’ADF-RDA comme hosties et victimaires, Zida veut le distraire de l’OPA en cours sur le futur immédiat du pays. Les Kafando, Bénéwendé, Diabré et consorts se défouleront volontiers sur les partis déchus de leurs droits. Puis, ce sera, comme dans l’histoire de la cigale et de la fourmi, leur tour de déchanter.

L’interdiction du CDP et de l’ADF-DRA par le régime Zida est donc un acte de défiance envers au moins trois instances : a) le peuple du Burkina Faso, privé d’institutions fiables depuis les 31 octobre 2014, et livré aux caprices de nouveaux maîtres en treillis de Ouagadougou qui commencent à croire en leur étoile et s’enivrer de leur pouvoir inespéré ; b) les citoyens du CDP et de l’ADF-RDA qui espéraient que la chute du Président Compaoré leur laisse ne serait-ce que le répit nécessaire pour réorganiser leur participation à la dynamique démocratique républicaine au Faso ; c) la communauté internationale (CEDEAO, UA, ONU, BM, FMI) qui par certains côtés aura fait preuve jusqu’ici d’un certain laxisme envers les imposteurs de Ouaga qui ont fini par y voir la source principale de légitimité de leur pouvoir. Par cette triple trahison, la transition devient dès lors un repère délétère de Judas en transit vers de sérieuses déflagrations politiques.

III

Interdiction politique et violence au Burkina Faso

La transition burkinabé se mue donc tous les jours en flagrante trahison. L’interdiction scandaleuse du CDP et de l’ADF-RDA est donc la preuve ostentatoire du choix du Lieutenant-Colonel Zida de fausser la transition burkinabé en prenant le parti de l’ancienne opposition burkinabé contre le reste du peuple. Zida cesse d’être un arbitre neutre dès lors qu’il ligote les mains d’un camp et arme l’autre de gourdins pour assommer les ligotés. Zida se positionne dès lors en Chef de Campagne du CFOP Diabré et de ses acolytes du MPP et Cie pour la présidentielle truquée qui s’annonce au Faso. Comme le Général Guéi, encouragé en cela par le FPI, osa exclure de la présidentielle 2000, les présidents Bédié et Ouattara, ainsi Zida prépare-t-il les germes de la frustration et de la fracture civile burkinabé que l’élection étriquée qu’il prépare viendra enflammer. Qui ne voit pas que ce premier ministre de circonstances en nuisible, qui confond volontiers décret et arrêté ? Se comporte en conseils de ministres comme s’il était président de la république ? Qui ne voit pas la rustrerie de ce soldat sans finesse qui flingue la diplomatie de son pantin de partenaire Kafando, en signant dans son dos des textes revanchards alors que le supposé Président de la Transition se trouve précisément à Abuja où il joue les apôtres de paix et de réconciliation ?

Dans l’ancien parlement burkinabé, régulièrement élu, il est incontestable que le CDP et l’ADF-RDA représentaient la majorité effective des burkinabé. Que leur laisse comme espaces d’expression et d’existence l’interdiction des deux partis politiques qui portaient leurs aspirations ? On ne saurait contourner la question du rapport entre la violation d’un droit politique essentiel des citoyens et leur droit de résistance civique. Lorsque le pouvoir bâillonne toute opposition et veut faire cavalier seul devant le peuple, il déclenche de fait la légitime défense des spoliés qui tôt ou tard le mettent face à sa forfaiture. Interpréter aujourd’hui le silence de la majorité brimée du CDP et de l’ADF-RDA comme une impuissance éternelle, n’est-ce pas s’exposer aux prochaines surprises de l’Histoire du Burkina ?

Il urge, sans conteste, que la tragédie de la fracture civile que les décrets liberticides des nouveaux césars de Ouaga favorisent soit évitée au Faso. Ceux qui rêvaient de confier leur liberté aux militaires de la junte de Zida en ont désormais pour leur frais. Que faire d’autre que de reprendre l’initiative de la pleine vie démocratique qui battit le plein dans ce pays sous le magistère du président Blaise Compaoré ? Ceux qui croyaient qu’en reniant le président Compaoré, ils seraient à l’abri des ennuis ont bien compris aussi qu’il n’y aura d’espoir que dans la reconnaissance de leur bilan, l’assomption de leur engagement et la persévérance dans la lutte pour le respect de leurs droits et libertés dans ce pays, comme le leur a du reste courageusement prescrits l’actuel prisonnier politique Assimi Kouanda, très courageux Secrétaire Exécutif du CDP. Enfin, la communauté internationale aura bien compris qu’il ne sert à rien de prolonger davantage cette transition burkinabé qui chaque jour s’enlise en cauchemar pour les libertés individuelles et collectives que les progrès politiques accomplis sous le président Blaise Compaoré dans ce pays avaient entérinées. Et comme l’a si bien souligné l’Ambassadeur des Etats-Unis à Ouagadoudou, plus tôt la transition cessera, mieux ce sera pour le Faso. Car laisser ces loups peaufiner la transition, c’est donner loisir aux préparatifs d’implosion de l’union nationale burkinabé par quelques médiocres par effraction parvenus au pouvoir pour le malheur des justes espérances du peuple du Faso. Sans le respect strict du pluralisme politique au Burkina Faso, il faudra s’attendre à ce que les voix injustement étouffées s’expriment bientôt d’une manière. Ou d’une autre. On l’a largement vu ailleurs. A bon entendeur…

[1] http://democratie.francophonie.org/IMG/pdf/burkina.pdf

[2] http://www.lefaso.net/spip.php?article62307

Partager cet article
Repost0
28 novembre 2014 5 28 /11 /novembre /2014 21:37
Lieutenant-Colonel Zida, libérez le ministre d'Etat Assimi Kouanda!

Une lettre de protestation du Professeur Franklin Nyamsi

Monsieur le Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida,

Lorsqu’un pouvoir putschiste se déguisant derrière le nom du peuple, attente à la république, le mérite des gens d’honneur est de garder la nuque raide et de défendre leurs valeurs, avec fermeté, courage, lucidité et dignité. Telles sont la hauteur et l’exigence avec lesquelles les dirigeants courageux de la majorité politique déchue par votre putsch des 30-31 octobre 2014 à Ouagadougou se sont tenus droits dans la tempête.

Lorsqu’on prétend avoir mis fin à l’ère des hommes forts pour la remplacer par celle des institutions fortes, on ne perpètre pas d’injustice aussi flagrante que l’embastillement d’un homme innocent. Où est la justice, quand la liberté est refusée à ceux qui la respectent et la chérissent ? S’être battu par les moyens légaux et légitimes pour que le peuple burkinabé soit consulté à propos de l’article 37 de la Constitution n’est pas un crime. La différence politique est légitime !

Or donc, parce qu’il s’est efforcé de rester libre et d’assumer son engagement pour les valeurs républicaines du Faso, un homme innocent croupit actuellement dans les geôles de votre junte, Lieutenant-Colonel Zida. C’est le ministre d’Etat Assimi Kouanda, secrétaire exécutif du CDP, Congrès pour la Démocratie et le Progrès, ex-parti au pouvoir au Burkina Faso.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda n’a pas fait brûler l’Assemblée Nationale du Faso, comme vous, vos alliés Diabré et Bénéwendé, l’avez fait devant le monde entier à Ouagadougou.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda n’a pas fait piller vos maisons, comme vous et vos alliés Diabré et Bénéwendé, l’avait fait faire des résidences de nombreux dirigeants du CDP, devant le monde entier, au Burkina Faso.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda n’a incité aucun burkinabé au meurtre, ni à la guerre civile, comme vous et vos alliés, l’avez ostentatoirement fait à Ouagadougou, instrumentalisant la foule et une partie de l’armée contre les institutions pourtant légitimes et légales de la république.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda, contrairement à vous, n’a posé aucun acte déloyal envers l’Etat du Faso et notamment celui qui, par la voie des urnes et en vertu de la constitution, l’incarnait : le président Blaise Compaoré.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda, contrairement à vous et vos alliés Saran Sérémé, Etienne Traoré, Bénéwendé, Diabré et Cie, n’a incité personne à la xénophobie dans la presse burkinabé, encore moins manipulé le sentiment burkinitaire dans la jeunesse de ce pays.

Le ministre d’Etat Assimi Kouanda, contrairement à vous, n’a contraint aucun burkinabé à l’exil et n’a organisé, au mépris des normes constitutionnelles, aucun harcèlement médiatico-judiciaire d’un homme d’Etat du Burkina Faso.

Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida, libérez donc le ministre d’Etat Assimi Kouanda et respectez le droit du CDP de porter la contradiction à votre régime, si tant est qu’il vous reste un soupçon d’équité et un zeste de conscience des dangers et catastrophes que l’injustice prolongée génère dans toute société humaine.

Oui, Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida, libérez maintenant et sans condition, le ministre d’Etat Assimi Kouanda, parce qu’il est innocent et que le coupable de l’instabilité actuelle du Faso, c’est vous et vos alliés !

Oui, Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida, les prisons sont faites pour les coupables et mon Frère et Ami, le ministre d’Etat Assimi Kouanda est un homme né libre, de bonnes mœurs et le restera à jamais pour ceux qui le reconnaissent véritablement, l’aiment et se battront avec persévérance pour que vous le relâchiez !

Et ce ne se sera que justice.

Fait à Paris, ce 28 novembre 2014.

Partager cet article
Repost0
25 novembre 2014 2 25 /11 /novembre /2014 21:09

Une tribune internationale de Franklin Nyamsi

Professeur agrégé de philosophie

Paris, France

On nous avait claironné que le peuple burkinabé faisait sa révolution. Ni plus, ni moins. De quelle idéologie se revendiquait ce bric-à-brac composite de révolutionnaires ultralibéraux, marxistes, centristes et religieux ? Le silence régnait sur toutes les colonnes, quand la profondeur de la chose était interrogée. Mais la prétention se faisait encore plus ambitieuse, sans vergogne. Après 27 années de pouvoir Compaoré, les animateurs des foules enfiévrées des 30-31 octobre 2014 ne juraient que par un seul mythème: le peuple, tout le peuple, rien que le peuple, reprendrait les rênes de son destin. Une insurrection instrumentalisée vaut-elle un vote démocratique? Pas en nos temps modernes, hélas. On préféra la dialectique des gourdins à celle des urnes. Un temps, l’histoire semblait refaire bond en arrière, comme dans une volte face inédite, l’acrobate retrouve la position qu’il a prestement quittée auparavant. L’extrême-gauche africaine, comme réveillée de son sommeil dogmatique, exultait de nouveau, contente de voir bientôt réhabilitée sa gouaille. Le professeur Ibriga, un des forts-en-thème de ce Grand Soir, voyait venir, fleur à la bouche, le printemps des sankaristes. Dieu que c’était beau, attendrissant même! Les enfants de choeur de la politique politicienne burkinabé étaient enfin rassemblés comme un seul homme. A sa démarche chaloupée et à ses airs graves, on devinait que l’ex-opposant Diabré se voyait d’ores et déjà Chef de l’Etat du Faso au terme de l’exclusion programmée de ses adversaires du CDP des instances de la transition. Les pseudo-démocrates et leurs hordes de bien-pensants vivant dans leurs tours aux bulles, qui firent casser et brûler le temple parlementaire de la démocratie burkinabé au nom de « la colère légitime des foules », se remirent à entonner le chant de l’Etat de droit qu’ils avaient pourtant discrédité en piétinant les écharpes sacrées des élus du peuple, au nom de la foule qu’ils déclarèrent solennellement plus peuple que le peuple. Tout ce beau monde se prévalut avec fierté de ses propres turpitudes. Que faire d’autres quand les enfants s’amusent?

On retournait donc à la page laissée blanche le 15 octobre 1987 par le Capitaine Thomas Sankara: autre mythe intouchable, dont la seule évocation déclenche encore les ires tremblotants des gardiens d’un certain temple de la sainteté politique africaine. On relançait cette foire aux émotions africanistes, qui ne voyait pas la dizaine d’officiers passés par les armes le 11 juin 1984 sous les ordres du Président Sankara à Ouagadougou, en plein jour. Et les voix à jamais étouffées de leurs épouses éplorées, de leurs orphelins, n’ont pas trouvé de propagande pour les déifier. Oui, on nous avait vendu la meilleure des poudres ouagalaises pour niais rassemblés: le pouvoir irait aux civils, tout de suite. Rien que cela! L’armée, supposée être demeurée au pouvoir depuis 1966, s’en irait définitivement dans ces casernes, laissant les fonctions politiques aux civils et se concentrant désormais, exemplairement, sur ses tâches républicaines et régaliennes de principe. Dieu, que c’était touchant! Le 18 novembre 2014 pourtant, dans un jeu de chaises musicales qui aura rappelé à tous les observateurs avertis le sinistre et risible manège de Poutine et Medvedev en Russie, Le nouveau président de la Trahison- pardon, la Transition - burkinabé, le diplomate Kafando, nommait au poste de premier ministre, Chef du Gouvernement de Transition, celui qui avait fait des pieds et des mains pour le faire choisir comme Président de la Transition, à savoir le Lieutenant Colonel Zida Yacouba, pièce maîtresse du putsch anti-Compaoré. Deux questions se posent aujourd’hui: 1) Ce qui se passe aujourd’hui au Burkina Faso était-il prévisible? 2) Peut-on déceler des lignes de crête du futur à court et long terme de ce pays, désormais pleinement installé en zone de turbulences et d’incertitudes?

I

Retour sur nos anticipations de l’an 2014

Dès janvier 2014, il m’est clairement apparu que quelque chose de très grave se tramait contre les progrès démocratiques au Burkina Faso. Derrière le débat sur le référendum concernant l’article 37 de la constitution, dans l’ombre du débat pour ou contre l’instauration du Sénat, se profilait le masque hideux du discours identitaire, la haine rentrée de la compétition démocratique et l’usurpation instrumentale du nom du peuple par des coteries intéressées à l’accès coûte que vaille au pouvoir d’Etat, fut-ce au prix d’une tragédie civile.

D’abord donc le discours identitaire. Entonné par les Etienne Traoré et Saran Sérémé dès janvier 2014, relayé par une opposition prompte à faire l’éloge des racines du burkindi éternel, trempé dans on ne sait quelle quintessence magique qui le rendait incontestable, invincible et sûr de son avenir, a fait mouche dans l’opinion. C’est au nom de cet identitarisme à fleur de peau que la mission de bons offices de la Côte d’Ivoire fut rabrouée avec véhémence, alors même que la voix du Burkina Faso, à travers la diplomatie proactive du président Compaoré, avait pesé de tout son poids dans la résolution du différend ivoirien entre 2002 et 2011. Ce faisant, l’opposition burkinabé, pressée de plastronner à Kosyam ne se tirait-elle pas diplomatiquement une balle dans le pied? Dans la géopolitique de la sous-région, un pays enclavé et très pauvre comme le Burkina Faso pourra-t-il se payer le luxe de l’isolement diplomatique? On aimerait bien voir la tête que feront les nouveaux gouvernants de Ouaga quand ils mettront les pieds à Abidjan, dans un pays où leur attitude envers le pouvoir Ouattara a frisé le pur et simple mépris des intérêts de leurs près de quatre millions de compatriotes immigrés. On aimerait voir Yacouba Isaac Zida venir défendre les intérêts du Faso à Yamoussoukro, non loin du lieu où la Côte d’Ivoire reconnaissante et courageuse a hébergé contre tous les cris d’orfraie des officines de la haine identitaire africaine, son fils adoptif, le président Blaise Compaoré.

Ensuite, les ennemis du référendum populaire, aujourd’hui au pouvoir à Ouaga, se sont signalés dès décembre 2013 par un refus sans concession des normes de négociation, de compromis et de consensus dignes des sociétés démocratiques. Tel était le sens du fameux « Hey » menaçant qu’ils n’arrêtaient pas de lancer dans tous leurs fora au Faso. Au lieu de porter le fer sur les conditions de transparence et d’équité du référendum sollicité par le régime Compaoré, l’opposition burkinabé s’est retrouvée très tôt campée dans la ligne dure du démago-populisme. L’opposition a renié ou fait semblant d’ignorer le jeu démocratique pour arriver coûte que vaille au pouvoir. Elle , qui rassemblait uniquement des foules ça et là, s’est autoproclamée peuple du Faso et s’est arrogée le droit de décréter ce que le peuple par elle émasculé, voulait ou ne voulait pas, paradoxalement. On a joué la rue contre l’urne, le stade contre l’assemblée, la querelle envenimée contre le débat réglé et raisonnable. Pourquoi avoir refusé tout arbitrage du différend politique par le vote? On le sait bien aujourd’hui: les leaders de l’opposition étaient en étroit contact avec des animateurs des mouvements de jeunesse et des militaires pressés de jouir des fastes du pouvoir. C’est parce qu’ils avaient un gourdin sous le coude que les opposants au président Compaoré paraissaient si dégourdis, sûr de leurs soutiens et de leur fait. J’ai parlé très tôt d’un complot en cours contre le régime Compaoré, en un temps où certains voulurent confondre mes dires basés sur des analyses empiriques avec les délires des prophètes d’autrefois au Gbagboland.

Enfin, je craignais une usurpation massive de la souveraineté populaire burkinabé par ces manipulateurs de foules. Je ne m’y suis pas trompé. Le plan de prise de Ouagadougou par l’alliance Zida-Bénéwendé- Diabré fut exactement celui-là. La référendophobie cachait une grave démocratophobie. La peur de l’élection masquait mal la peur du pluralisme politique. Les vieux réflexes centralistes de l’ère gauchiste de Sankara étaient de retour. A force de dire à tout va « A bas ceci », « A bas cela », nos gueulards de Ouaga finirent par trucider la démocratie burkinabé en son temple le plus sacré. Ce sont effectivement ces Zida-Bénéwendé- Diabré, et leurs affidés excités à l’envi qui allaient casser et brûler le temple de la représentation nationale et constater le vide politique qui en résulterait, en véritables pompiers-pyromanes. Or l’élection législative de 2011 avait-elle été truquée? Que nenni. L’élection présidentielle de 2010 n’était-elle pas légale et légitime? Pour sûr. Diabré n’aurait pas accepté le statut de CFOP (Chef de file de l’Opposition) sans la reconnaissance préalable de la victoire électorale du CDP aux présidentielles et passim.

Il ressort dès lors que mes anticipations critiques sur le devenir politique du Burkina Faso à court terme ont été hélas confirmées par les faits. Faut-il dire ici en quoi le CDP au pouvoir aura certainement aussi péché dans cette affaire? Au moins sur trois points: a) Sur le plan de la bataille des idées, la mesure de l’ampleur de l’intoxication populaire de la propagande des putschistes a été prise trop tard par le pouvoir CDP qui n’y a pallié que par de timides mesures de réorganisation. Or dès le mois de janvier 2014, la communication politique du régime vacillait fort. Jusque dans le très gouvernemental quotidien Sidwaya, l’opposition avait le vent en poupe à travers la censure systématique des écrits qui la critiquaient. Par ailleurs, l’opposition avait verrouillé de nombreux médias politiques par des micro-censeurs sournois, qui noyaient les répliques à la vulgate putschiste par la pompe haineuse et baveuse des bloggers grossiers des réseaux Cibals. Il aurait médiatiquement fallu répondre strictement coup pour coup à un ennemi qui s’était déjà infiltré au coeur même du pouvoir Compaoré. b) Sur le plan de la bataille morale, le CDP au pouvoir a tardé à se défaire des prévaricateurs qui s’étaient fortement embourgeoisés en son sein, payant du coup la note d’une impopularité auprès des petites gens du Faso, qui n’ont pas risqué leur peau dans la défense de l’ancien pouvoir. c) Enfin, il est de notoriété que le régime CDP a perdu la bataille géopolitique quand la France et les USA, par plusieurs sorties bien calculées, ont remis en cause le droit souverain de l’exécutif burkinabé de solliciter une réforme de la constitution en son article 37. Les anticolonialistes dogmatiques africains, qu’on n’entend jamais critiquer l’Angola de Dos Santos, au pouvoir depuis 1977, ont cette fois ci brillé par leur mutisme sur l’ingérence offensive des administrations occidentales d’Obama et Hollande dans les affaires burkinabé. N’est-il pas certain que cette défiance franco-américaine a servi de carburant psychologique ultime aux insurgés des 30-31 octobre 2014? Ils étaient sûrs de la couverture de leurs forfaits par la communauté internationale, tout comme par la poignée de Chefs d’Etat ouest-africains qui se sont précipités à Ouaga pour flatter le trio putschiste, contre tout l’esprit de la jurisprudence récente de la CEDEAO en matière de coups d’Etat ( Guinée-Bissau, Mali).

II

Qu’en est-il aujourd’hui? Le pseudo-Poutine Zida à découvert

Les événements qui se sont enchaînés du 30 octobre 2014 à la nomination du Gouvernement Zida permettent de lire avec clarté dans ce qui n’était encore qu’un jeu de cache-cache il y a trois semaines. On a cessé de croire que le Lieutenant Colonel Zida a surgi par hasard dans cette affaire quand les déclarations de ses alliés Sams’K Le Jah, Diabré et Bénéwendé ont reflété exactement les mêmes éléments de langage que les siennes propres. Zida était en intelligence avec l’opposition et les mouvements de jeunesse pour renverser le président Compaoré sous quelque motif possible. On a aussi cessé de croire que l’ambassadeur Kafando a jailli des débats du Comité de désignation du président de la Transition comme un Joker surgit d’un jeu de cartes ausculté au hasard. On sait que monsieur Kafando, de loin plus âgé que le président Compaoré, ne représente surtout pas l’avenir de la politique burkinabé dont il est un vieux routier et un pur produit. On sait que monsieur Kafando doit de larges pans de sa carrière à l’ouverture d’esprit du Président Compaoré qu’il fait mine de découvrir aujourd’hui. On sait que ministre et diplomate des régimes de 1983 et de 1987, M. Kafando est nécessairement comptable de leurs bilans, qu’il n’a pas osé dénoncer quand il était ambassadeur du régime Compaoré à l’ONU. On sait que monsieur Kafando, du reste, n’est que le faire-valoir du pouvoir militaire du Lieutenant-Colonel Zida, qui l’a certainement choisi en raison de sa mollesse et de l’inconsistance de son autorité sur les grands corps politiques de cette transition. Le président Kafando n’est donc qu’un clone, un ersatz dans un régime militaire pur et dur qui va mettre le Burkina Faso en coupé réglée. Kafando, c’est le répondeur de Zida. Tous les observateurs avertis au Burkina Faso et en dehors le savent, qui continuent d’appeler Zida « L’homme fort de la transition burkinabé », alors même qu’on nous disait dans les mêmes médias genre RFI et France 24, paradoxalement, que la chute du président Compaoré signait la fin des hommes forts au Faso. Au lieu donc de nous attarder sur l’ombre, intéressons-nous sérieusement à la proie.

La proie de l’analyse, c’est le Lieutenant-Colonel Zida et le système politico-militaire dont il est désormais le garant auto-proclamé. Cet homme n’est pas seulement dangereux. Il est essentiellement en danger. L’ex-président Blaise Compaoré a, d’une métaphore, situé le personnage: « il occupe une place que je ne souhaiterais même pas à mon pire ennemi », a-t-il dit, en substance, à Jeune Afrique. Qu’est-ce qui rend intenable, dangereux et éjectable, le fauteuil de Zida? Comme ses semblables Guéi l’ivoirien, Sanogo le malien, et Dadis Camara le guinéen, Zida arrive avec son treillis et ses poings fermés dans une Afrique de plus en plus réfractaire et indocile aux chefs en bottes. A mon sens, ce lieutenant-Colonel fort sournois, qui s’est empressé d’acquérir quelques parchemins dans le tard pour lisser son profil, aura maille à partir avec les quatre camps qu’il veut tromper: l’armée, ses alliés de l’ex-opposition politique et les dignitaires de la majorité CDP déchue du pouvoir par son coup d’Etat, et enfin la communauté internationale.

L’armée burkinabé, principale maîtresse du jeu politique actuel, ce n’est un secret pour personne, a régulièrement montré des signes de division interne ces dernières années. Mutineries, tentatives d’assassinat contre le Chef de l’Etat, revendications intempestives, intimidations de l’opinion publique par toutes sortes de remous, ont tôt fait de convaincre l’observateur que la Grande Muette du Faso est devenue une grande bavarde. La cacophonie putschiste née entre les officiers rivaux Nabéré Traoré, Yacouba Zida, Kwamé Lougué, a-t-elle soudain disparu au bénéfice de l’union sacrée de l’armée théâtralisée le 1er novembre 2014 derrière le lieutenant colonel Zida? Il y a loin de la cuiller à la bouche dans cette affaire. Sans oublier que la récupération du patronat du RSP (Régiment de Sécurité Présidentielle) par celui qui en fut le Chef en second, est loin de faire chorus dans cette unité d’élite. N’est-ce pas dans cet esprit que Zida s’est attribué la fonction symbolique de ministre de la défense, comme pour dire que ses rivaux militaires, Kafando et Cie seraient tous à portée de ses canons, comme le peuple burkinabé fait cocu, pendant cette transition militaire? Il y a fort à parier que la suprématie de Zida sur cette armée soit régulièrement mise à l’épreuve durant la transition amorcée, si de plus les problèmes structurels de soldes, de traitement des différents corps et de sécurisation du territoire liés à l’environnement hanté par les jihadistes venaient à s’aggraver.

L’ex-opposition politique burkinabé me rappelle étrangement la douce candeur du RDR en 1999, après le coup d’Etat hypocrite du Général Guéi contre le régime Bédié. On croyait que le saint-cyrien, conformément à ses voeux initiaux fort généreux, viendrait balayer la maison pour que des dirigeants réellement élus par le peuple s’installent enfin au pouvoir. Mais le « balayeur » en treillis prit tellement plaisir au balai et au palais qu’il voulut garder l’un et l’autre. Et hop, la transition militaire du Général Guéi se mua en martyre des cadres républicains ivoiriens. A Ouaga, Zida fait bien son Guéi. Ce signe d’appétit, voire de voracité politique, vient d’être convenablement donné aux Diabré, Bénéwendé et autres Ablassé Ouédraogo par un Zida qui s’est arrogé l’essentiel des ministères régaliens: la défense, l’intérieur, les mines, et les affaires étrangères (puisque Kafando obéira à son promoteur), mais aussi le contrôle des mouvements de jeunesse, à travers le ministère de l’intérieur et celui de la jeunesse & sports. Comme à des chiens récupérant les restes sous la table, le soldat Zida a jeté les os ministériels échappant au festin pantagruélique d’une armée burkinabé plus ostentatoire que jamais dans la gestion de la chose publique. On aura donc mené une insurrection populaire contre un régime légitime pour tomber sous la coupe réglée d’un régime militaire pur et dur. Les grincements de dents des opposants burkinabé ne tarderont pas à se faire entendre. Parions-le. Quand ils verront qu’envers eux aussi, Zida a son plan B comme il en a inventé un contre le CDP, la danse politique s’endiablera à Ouaga, de plus belle. On verra qui a mis de l’eau dans la noix de coco.

Le lieutenant-colonel Zida a multiplié des actes d’humiliation contre le régime qui l’a pourtant nourri, élevé et promu aux meilleures loges de l’armée, tout comme son comparse de parade, l’ambassadeur Kafando. Or l’ingratitude paie difficilement en politique comme dans la vie. Rappelons aux sourds invétérés que l’actuel président de la transition ne peut vouloir tourner la page d’un régime dont il porte l’ADN, auquel il doit ses plus prestigieuses promotions internationales, et qu’il a servi sans broncher pendant des décennies, pactisant de fait avec les faits de corruption qu’il fait mine de dénoncer aujourd’hui. Rappelons qu’au niveau de responsabilité qui fut le sien, le lieutenant-colonel Zida ne saurait objectivement s’exonérer du bilan d’un régime qu’il a hautement contribué à sécuriser de longues années durant. N’est-ce-pas bien lâche de vouloir présenter au monde comme un monstre le président Compaoré alors qu’on a auparavant bénéficié et profité de sa confiance? En tentant d’effacer le nom du président Compaoré des lieux symboliques du pays, en jetant en prison les cadres du CDP tel le Secrétaire Exécutif Assimi Kouanda, en laissant et faisant piller les biens de l’ex-classe dirigeante du pays, tout comme ils organisent aujourd’hui le harcèlement judiciaire des cadres du CDP, le duo Zida-Kafando veut distraire la galerie sur sa propre volonté de constituer des ressources en vue d’un siège long à la tête de l’Etat burkinabé. Pour le dire autrement, Zida et Kafando, en excluant activement le CDP de la transition politique, veulent faire gagner les élections présidentielles prochaines par un civil de leur choix. Que le civil en question vienne de l’opposition civile ou du chapeau magique de Zida, ne faut-il pas constater que la confiscation de la transition par les militaires annonce des élections absolument contentieuses pour ce pays? Les exclus du Burkina politique actuel resteront-ils longtemps à s’apitoyer sur leur sort ou entreront-ils en résistance? J’en doute, d’autant plus qu’aux portes du Burkina Faso, comme dans les campagnes ignorées par la gouaille des villes, grondent contre tous les camps politiques, des millions de laissés-pour-compte burkinabé de l’Etranger et de l’intérieur.

Je voudrais enfin toucher un mot de la gestion de la communauté internationale par le nouveau régime de Ouagadougou. Il apparaît très clairement à l’analyste que la CEDEAO s’est divisée sur le cas burkinabé et que cela présage de grosses difficultés diplomatiques pour le nouveau régime, qui a commis la funeste erreur de se démarquer des acquis accumulés en politique internationale par l’extraordinaire charisme et par l’intelligence politiques du président Blaise Compaoré. Au sein de la CEDEAO, la jurisprudence consacrée face aux putschs militaires n’a pas été respectée dans le cas du Burkina, puisque certains Chefs d’Etat, pressés de parer au plus urgent, se sont vite accommodés des arrangements des gagnants du jour à Ouagadougou. Là où on aurait dû faire jouer les clauses constitutionnelles en situation de vacance du pouvoir, on a laissé le bricolage d’une Charte écrite à la va-vite supplanter la loi fondamentale du pays. Au niveau de l’Union Africaine, l’impuissance a de longue date, trouvé sa parade dans les grandes déclarations sans conséquences, avec des délais agités comme des hochets qui amuseraient bien des bambins en cour de recréation. On a entendu Zida s’en moquer comme de l’an quarante. On a vu le président mauritanien de l’UA venir flatter les putschistes à Ouaga. L’ONU enfin, bien éloignée des réalités de la crise burkinabé et pressée d’éteindre un foyer d’insécurité de trop dans le voisinage de l’instable Mali, a fait siens les bricolages de Ouaga, allant jusqu’à saluer un texte de transition putschiste qui détrônait la constitution démocratique d’un de ses Etats-membres. Une négligence qui n’est pas loin de connoter quelque mépris pour la chose politique burkinabé. Le pouvoir Zida aura donc bénéficié d’une CEDEAO, d’une UA, d’une ONU molles et attentistes. Sera-ce le cas encore quand ce pouvoir commettra ses premières bavures lourdes et montrera que loin d’être la solution, il fait partie du différend burkinabé qui couve toujours? J’en doute fort.

De tout ce qui précède, je conclus que le Lieutenant-Colonel Yacouba Isaac Zida est décidément le pseudo-Poutine de Ouaga. « Pseudo » parce que contrairement à l’homme fort de Moscou, Zida n’a pas la puissance qu’il affecte d’avoir en dégommant par-ci tel directeur, en emprisonnant par-là tel cadre politique, ou en réécrivant maladroitement au jugé telle page d’histoire nationale burkinabé. « Poutine de Ouaga" quand même car de fait, avec un cynisme assumé et voulu comme les poings qu’il ferme durement dans toutes ses photos officielles, il a concentré l’essentiel des pouvoirs de la transition burkinabé dans ses seules mains, quoiqu’en disent les leaders de l’opposition civile qui croient gouverner à travers lui ou avec lui. « Pseudo-Poutine de Ouaga » parce que, comme Dadis en Guinée et comme Sanogo au Mali, ses jours sont très étroitement comptés à la tête de l’Etat burkinabé qu’il usurpe illégitimement depuis le 31 octobre 2014. Et voici donc l’avenir qui se profile. Quand les démocrates burkinabé relèveront la tête, il y a fort à parier que le Lieutenant Colonel Zida pliera prestement bagage…s’il en a le temps. Et alors, on méditera davantage ce mot de l’ex-président Blaise Compaoré parlant avec compassion et bienveillance du soldat Zida: «Il occupe une place que je ne souhaiterais même pas à mon pire ennemi. »

Partager cet article
Repost0