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13 mai 2015 3 13 /05 /mai /2015 12:01

Une tribune internationale de Franklin Nyamsi

Professeur agrégé de philosophie, Paris, France

Dans une démocratie émergente comme celle de Côte d’Ivoire, l’attention au sens explicite et implicite des paroles qui comptent est une exigence de tous les instants. Car ce sont ces paroles qui orientent le débat, guident certaines communautés et en structurent de nouvelles. Ces paroles qui comptent peuvent tout aussi bien désorienter, tromper, déstructurer. L’épée flamboyante du Verbe est à double tranchant. Il ne faut donc surtout pas négliger les dires dominants, les prendre pour argent comptant, ou les récuser a priori. La seule manière appropriée d’approcher un discours qui structure l’ordre du sens, c’est de l’analyser, en allant de son sens explicite à ses significations implicites, afin que ce qui se cache se révèle, que ceux qui veulent penser ce qui se dit ne laissent point se dérober l’essentiel, que bien des discours logent en creux dans leur non-dit. L’intellectuel lisant les discours à prétention orientatrice ne peut dès lors que souscrire aux philosophies du soupçon, telles les pensées nietzschéenne, marxienne ou freudienne, qui instruisent au cœur du 19ème siècle occidental, l’exigence de chercher l’inouï sous l’ouï, le latent sous le manifeste, l’infrastructure socio-politico-économique sous la superstructure du discours politico-idéologique, afin de mettre à nu les ruses contrebandières de la domination humaine. C’est donc ainsi qu’il faut lire tous les discours visant la sphère de la cité, et lire le discours que l’on produit soi-même sur ces discours, afin que la critique elle-même s’accompagne d’une autocritique. C’est précisément ainsi que je voudrais lire le discours de la lettre des archevêques et évêques ivoiriens, adressée aux opinions nationale et internationale depuis le diocèse d’Agboville le 10 mai 2015[1]. Dans la présente analyse, je m’imposerai dès lors quatre tâches : 1) Restituer en une synthèse bienveillante le message des archevêques et évêques ivoiriens ; 2) Questionner dans ce message, le statut de la distinction républicaine nécessaire entre société politique et société religieuse ; 3) Examiner certaines recommandations de la lettre épiscopale du 10 mai 2015, qui ressemblent curieusement à des chèques en blanc à l’opposition politique, déguisés cependant en vertueuses recommandations ; 4) Revenir sur l’interprétation que la lettre épiscopale sus-évoquée fait des relations entre république, pluralisme religieux et pluralisme politique, en regard de la Constitution de l’Etat de Côte d’Ivoire.

I

Restitution synthétique de la lettre épiscopale ivoirienne du 10 mai 2015 : cathosolutions contre adosolutions

Il n’y a rien de pire qu’une critique portant sur un texte qu’elle veut dépasser sans être passée par lui. L’honnêteté de l’intellectuel requiert l’application du principe de bienveillance herméneutique si cher au penseur allemand Schleiermacher. Bien comprendre, c’est manifester notre bonne volonté envers celui qui parle, de telle sorte que si nous récusions par la suite son dire, cette récusation s’effectuerait comme de l’intérieur de sa propre conscience, puisqu’il aura été auparavant convaincu de notre effort de nous approprier la quintessence de son discours.

Qu’en est-il donc du texte analysé ? La lettre est structurée en trois moments, fidèles en cela à l’inspiration trinitaire des rédacteurs, tout comme à leur sens dialectique, puisqu’elle semble procéder tout aussi bien par thèse, antithèse et synthèse. La première partie de la lettre évoque la « situation actuelle » de la Côte d’Ivoire. Tout en soulignant très rapidement les efforts entrepris par le gouvernement Ouattara pour ramener la sécurité, la prospérité, la paix et la concorde sociales, les archevêques et évêques réunis dans le diocèse d’Agboville sont cependant formels sur ce qui semble de toute évidence être un constat d’échec de la politique entreprise. Morceaux choisis ?

« Les rancoeurs, les tensions, les frustrations, les traumatismes, et la pratique du rattrapage ethnique sont toujours présents dans notre pays […] L’on reste toujours arc-bouté à son appartenance régionale, tribale ou ethnique. Par ailleurs, le problème foncier reste entier dans certaines régions. »

Dès lors que le constat d’échec ou de blocage pathologique de la société est ainsi établi par les prélats de l’Eglise catholique ivoirienne, le deuxième moment du texte se donne comme la solution aux impasses du premier. Le bilan du régime issu des élections de 2010 est ainsi implicitement estampillé. Les grands prêtres ainsi rassemblés se font alors thérapeutes du social. Que faire ? Sans emprunter à Lénine sa formule, ils n’hésitent point à se faire force de propositions. De telle sorte qu’on peut dire désormais que les cathosolutions côtoient désormais dans le champ politique ivoirien, les adosolutions qui n’auraient pas réussi à empêcher, du point de vue de l’épiscopat réuni, l’impasse constatée. Quelles sont donc les cathosolutions ? A la lecture du texte, on peut aisément en dénombrer six : 1) La rencontre nécessaire entre leaders politiques ivoiriens qui ne se seraient toujours pas rencontrés ; 2) L’unité au sein de chaque famille politique ivoirienne (allusion à peine voilée aux dissensions entrevues au PDCI-RDA, au FPI et au PIT) ; 3) Le désarmement (adresse à tous les groupes résiduels armés en Côte d’Ivoire) ; 4) La pratique de la vérité ( domaine que l’Eglise se réserve de fait comme un monopole incontestable) ; 5) Une justice équitable (allusion à peine voilée à la nécessité de condamner aussi des forces pro-Ouattara dans les tribunaux nationaux et internationaux) ; 6) Le pardon, apothéose d’un processus de réconciliation nationale qui avait bien commencé, selon nos archevêques et évêques, avec la CDVR de Charles Konan Banny, mais qui semble mal en point avec la CONARIV confiée à l’évêque Ahouanan[2] de Bouaké.

Le troisième axe de la lettre, en guise de synthèse, insiste donc sur la nécessité d’une responsabilisation collective des acteurs de la parole dominante en Côte d’Ivoire. Aux leaders politiques, les archevêques et évêques recommandent d’éviter les « aventures idéologiques meurtrières », quels que soient les résultats des élections. Aux militants de tous les partis, la tolérance, aux journalistes de tous bords, la modération et le professionnalisme. Aux jeunes ivoiriens, la vigilance et la non-violence, et enfin, aux autorités religieuses de toutes obédiences, le courage de « dénoncer les pratiques occultes liées aux élections qui, hélas, vont quelques fois jusqu’aux sacrifices humains ». Comment nier, au regard des trois axes de la lettre épiscopale ivoirienne du 10 mai 2015, qu’elle fait vraiment partie de ces actes de bonne volonté dont toute société en quête d’émergence doit se nourrir ? Les idéaux d’humanité énoncés par ladite lettre peuvent difficilement souffrir de contestation, car ils s’inspirent de la règle d’or, véritable principe d’universalisation de la loi morale qui prévoit qu’on ne fasse aux autres que ce que l’on accepterait soi-même que les autres nous fassent, voire qu’on fasse aux autres tout le bien que nous pourrions à notre tout attendre d’eux. Pourtant, l’examen des attendus et implicites de la lettre nous montrera que l’idéal ne suffit jamais en politique, tant qu’il n’a pas réussi à prendre corps avec toute son exigence dans la gangue parfois résistante de la vie réelle. Pour montrer le soupçonnable tapi dans les interstices anodins de cette lettre, nous relirons donc chacun de ses axes en en faisant émerger le non-dit. On verra alors ce qui, fort secrètement dans la lettre examinée, pourrait s’avérer en porte-à-faux avec l’esprit de l’idéal d’humanité ouvertement allégué.

II

Déconstruction de la lettre épiscopale ivoirienne du 10 mai 2015 : le tabou de l’ivoirité démasqué

Le non-dit de la lettre d’Agboville est lourd de conséquences. Comment ? Il convient au préalable de méditer sur le lieu affiché de la lettre. Bien que les évêques et archevêques se soient réunis précisément à Taabo, toutes leurs correspondances insistent sur leur référence géographique au diocèse d’Agboville. De telle sorte que le contre-bilan qu’ils font de la gouvernance Ouattara résonne exactement comme une critique en direct du Chef de l’Etat en visite précisément dans la région…d’Agboville, dans cette même période, à quelques jours près. A peine le président de la république croit-il avoir convaincu ses compatriotes de la région de la Mé que le pays va mieux et ira de mieux en mieux, qui n’a pas remarqué qu’affirmer que le pays est dans une impasse consiste à contredire in fine le discours présidentiel devant le même public régional, national et potentiellement international ? La presse de l’opposition ivoirienne radicale ne s’y est pas trompée pour sa part, en présentant opportunément la lettre épiscopale d’Agboville comme sa propre réplique au discours du pouvoir à Agboville.

Dans le premier axe de la lettre épiscopale ivoirienne, le bilan apparemment implacable des prélats pose que « Les rancoeurs, les tensions, les frustrations, les traumatismes, et la pratique du rattrapage ethnique sont toujours présents dans notre pays […] L’on reste toujours arc-bouté à son appartenance régionale, tribale ou ethnique. Par ailleurs, le problème foncier reste entier dans certaines régions. » Qui n’a pas remarqué que les archevêques omettent la nécessaire prise en compte des tensions de type religieux, qui engageraient aussi leurs propres responsabilités ? Dans un pays, à titre d’exemple, où l’Eglise n’a toujours pas levé son coin de voile sur les conditions de la mort violente du Général Guéi et de nombreux membres de sa famille, comment penser qu’elle contribue entièrement elle-même à la fin des tensions, rancoeurs, frustrations, traumatismes, etc.? On aurait clairement du mal à croire que les positions ouvertement pro-Gbagbo de l’archevêque défunt Bernard Aggrey ne constituent pas la doctrine politique secrète de l’Eglise catholique ivoirienne actuelle. Dans un pays où l’Eglise rassemblée peine à nommer clairement l’idéologie de l’ivoirité par son nom, mais s’empresse d’emprunter aux doctrinaires frontistes de l’ivoirité, la notion-anathème de « rattrapage ethnique », comment croire que les archevêques et évêques n’aient subrepticement épousé la grammaire politicienne du Front Populaire Ivoirien ? Dans un pays où l’analyse politique des responsabilités chronologiques et logiques dans la tragédie postélectorale de 2010 désigne clairement le régime de Monsieur Laurent Gbagbo comme auteur de la descente aux enfers de la nation ivoirienne, comment comprendre que les prélats rassemblés s’attachent à mettre sur le même plan les coupables et les résistants ? Dans un pays où le nordiste et le musulman furent stigmatisés, molestés et assassinés en tant que tels pendant de nombreuses années au nom de l’idéologie de l’ivoirité, comment comprendre que l’Eglise catholique ivoirienne, qui sait pourtant que c’est une coalition transethnique, le RHDP, qui gouverne consensuellement le pays, puissent entonner à son tour les sirènes du « rattrapage ethnique » ? Enfin, où trouver du sens dans une évocation du problème foncier ivoirien, qui oublie d’indiquer que le foncier rural a justement été instrumentalisé par les doctrinaires de l’ivoirité, et que la loi de décembre 98 sur le foncier est précisément venue bâcler le processus de dialogue foncier entamé quelques années plus tôt par la Côte d’Ivoire avec l’aide de l’Union Européenne ? La lettre épiscopale du 10 mai refuse manifestement de procéder à une compréhension logique et chronologique de la crise ivoirienne, car celle-ci obligerait les évêques et archevêques à nommer le mal identitaire qui a failli livrer ce pays au génocide, n’eût été l’action courageuse du MPCI/Forces Nouvelles à compter de 2001 et de l’opposition politique menée par le RHDP à partir de 2005 notamment, sans oublier la longue lutte anti-discriminatoire entreprise par le RDR dès 1994. Une lecture anhistorique de la politique ivoirienne ne peut dès lors que servir les coupables et desservir les victimes de la crise.

Dans le second volet de la lettre épiscopale ivoirienne, apparaissent donc les cathosolutions, supposées mieux résoudre le problème politique national que les adosolutions. Examinons donc la condition première : comment penser une rencontre entre les principaux leaders politiques sans évoquer ainsi en sous-main la revendication frontiste de libération de Laurent Gbagbo de sa prison de la CPI à La Haye ? Tous les leaders politiques présents en Côte d’Ivoire se rencontrent, se sont rencontrés et peuvent se rencontrer à tout moment, en tant que de besoin. Ce n’est donc pas d’eux que nous parlent les évêques et archevêques, mais bel et bien de l’ancien président ivoirien. Comment admettre que les responsabilités incontestables de Laurent Gbagbo dans la crise postélectorale 2010 soient ainsi balayées du revers de la main par les rédacteurs de la missive d’Agboville ? Si pour l’Eglise catholique, la libération de Laurent Gbagbo est la condition de la paix en Côte d’Ivoire, que dire des souffrances innommables que la liberté de Laurent Gbagbo aura infligées aux populations de Côte d’Ivoire ? La seconde recommandation des archevêques et évêques appelle à l’unité dans chaque parti politique. De quel droit au fait, les religions diraient-elles aux partis politiques de rester identiques à eux-mêmes, de se fossiliser au besoin ? N’est-ce pas l’incongruité même, si l’on reconnaît que la liberté d’association, en démocratie, va de pair avec celle de dissociation, de séparation, comme de ré-association ? L’injonction à l’unité des partis est-elle une manière pour les rédacteurs de cette lettre de vouloir que l’opposition au Président Ouattara soit résolument plus forte que le RDR, seul parti à n’avoir connu aucun risque de schisme depuis la chute de Laurent Gbagbo ? Rien à dire sur la recommandation au désarmement de tous les groupes civils armés issus de la période de crise, à condition qu’on entende autant les supplétifs des MPCI/FN que les miliciens de la Galaxie Pro-Gbagbo, pour lesquels le texte ne semble pas trouver de mots assez fermes. Par contre, que dire de l’injonction à la vérité qui constitue certes un principe irrécusable, mais que l’on peut opposer à l’Eglise catholique ivoirienne elle-même, au regard des non-dits que nous dévoilons ici ? Lorsque l’Eglise catholique ivoirienne requiert dans son troisième volet épistolaire, la renonciation aux « aventures idéologiques meurtrières », est-ce sa façon à elle de ne pas nommer l’ivoirité, alors même qu’un Cardinal Aggrey défendit cette doctrine criminelle en son temps, au nom même de l’Eglise catholique ivoirienne qu’il représentait ? Quelle valeur accorder aux exhortations vertueuses faites aux leaders politiques, aux militants, aux journalistes, aux jeunes, aux autorités religieuses, si le vice politique suprême de la Côte d’Ivoire contemporaine, l’ivoirité, n’est même pas nommément identifié, alors qu’on nous sert allègrement le chantage au « rattrapage ethnique » des gens du Nord et des Musulmans servi par les officines propagandistes du FPI ? Certes, selon les prélats, « Chacun devra reconnaître sa responsabilité dans les crises successives qui ont secoué notre pays ». Mais peut-on commencer par les responsabilités de l’Eglise elle-même, à titre exemplaire ? On attend toujours.

Disons-le tout net. Il ressort clairement d’une analyse critique de la lettre épiscopale d’Agboville qu’elle opère trois confusions condamnables qui nous obligent à rédiger, à la manière de Baruch de Spinoza au XVIIème siècle unTraité Théologico-Politique minimal pour la Côte d’Ivoire contemporaine.

  1. La lettre épiscopale confond la société politique ivoirienne avec société religieuse catholique qu’elle veut promouvoir. Or la société politique est l’espace du sacré républicain qui est immanent (intérieur) à la cité et non du sacré divin qui est transcendant (au-delà de) à la cité. L’article 2 de la constitution ivoirienne de 2000 précise bien que « la personne humaine est sacrée ». L’article ajoute même : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux devant la loi. » Pas devant Dieu ! Le sacré républicain, consacré par la loi républicaine, c’est l’intérêt général vécu par tous, le sens du Bien Commun, qui peut raisonnablement rassembler les citoyens croyants, non-croyants, ou agnostiques, autour de lois et valeurs qui s’imposent à la raison pratique universelle parce qu’elle peut en tester la justice et la fécondité en bien-être collectif. En adressant donc des injonctions d’unité aux partis politiques, l’épiscopat réuni à Agboville se trompe de sphère de compétence. Les citoyens, en république, ont le droit de s’associer et de se dissocier librement, selon les conventions qu’ils se donnent ou auxquelles ils renoncent. Au sein de la communauté ecclésiale catholique, on peut parfaitement comprendre que l’injonction d’unité des évêques soit parfaitement légitime. Pas dans la république. Ici, la seule invocation d’unité qui vaille doit concerner la loi fondamentale, la constitution, à laquelle tous se doivent d’être obligés. Je dis bien « obligés », et non « soumis ». Aucune autorité religieuse n’a vocation à dire au citoyen, en république, de rester dans son parti politique ou d’en sortir. En cette sphère, le citoyen est le seul maître de son jeu.

  2. La lettre épiscopale du 10 mai 2015 confond les conditions d’une vraie réconciliation ivoirienne avec un blanc-seing donné aux revendications unilatérales de l’opposition radicale. Dans le vocabulaire des archevêques et évêques réunis à Agboville en effet, les mots de l’opposition frontiste, « rattrapage ethnique », « sacrifices humains à fins électorales », « justice non-équitable », sont pratiquement repris littéralement sans recul critique. Quant aux mots du pouvoir, ils subissent un lessivage neutralisant et lobotomisant, réduisant par exemple l’ivoirité à une pluralité d’ « aventures idéologiques et meurtrières », comme s’il y avait deux idéologies politiques meurtrières dans la Côte d’Ivoire actuelle. Le courage de la vérité, tâche à laquelle les prélats veulent s’adonner, requiert aussi la mémoire de l’histoire et la nomination objective du mal ivoirien, « le lent poison de l’ivoirité », selon la belle expression de Thomas Hoffnung. Pour que la Côte d’Ivoire se réconcilie, l’ivoirité, mais aussi le tribalisme réflexe des citoyens sous-éduqués moralement devront tomber sous le coup de la loi contre les discriminations. Telle est la méthode républicaine de lutte contre l’ensauvagement.

  3. La lettre épiscopale du 10 mai 2015 opère enfin une ultime confusion fâcheuse entre la conscience citoyenne et la conscience religieuse. Les archevêques et les évêques se présentent en effet dans cette lettre comme « les guides et les éclaireurs des consciences des hommes, des femmes et des communautés au nom de la foi en Dieu ». N’est-ce pas là l’erreur même ? Un citoyen républicain n’a de guide que sa propre conscience. Il n’est le suiveur de personne. C’est en sa libre et bonne volonté qu’il effectue ses choix politiques et ses engagements partisans. Comment vouloir dès lors s’emparer de la liberté de conscience des citoyens en république « au nom de la foi en Dieu » ? La constitution républicaine de Côte d’Ivoire n’oblige aucune citoyenne, aucun citoyen ivoiriens à avoir la foi catholique, la foi musulmane, la foi animiste ou à être athée. Elle garantit au contraire la liberté de conscience et la liberté de croyances. Ne faut-il pas que les rédacteurs de la lettre d’Agboville, dépassant le moment particulier de leur catholicité légitime, comprennent qu’ils ne peuvent s’adresser à tout le peuple de Côte d’Ivoire qu’en en respectant les prérogatives républicaines irréductibles à une obédience religieuse quelconque ?

    A tout le moins, la lettre des archevêques et évêques ainsi relue nous aura au moins permis ces précieux rappels, qu’une parole christique bien connue corrobore bien : « Il faut rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».

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